Elisabeth Vidal illumine Sainte-Rosalie

Ci-dessous, un aspect du public

Ci-dessus, la poupée Olympia "à plat" et "remontée"

Faut-il bénir les menaces d'orage d'avoir été la cause du transfert de la "Carte Blanche à Elisabeth Vidal" du parc de château à l'église Ste-Rosalie? Oui sans doute car dans ce cadre plus condensé, bénéficiant d'une acoustique mieux appropriée à un concert aussi intimiste, la diva a pu développer plus aisément les multiples facettes de son talent.
Avec l'orchestre Cannes-PACA, nous étions à un très haut niveau national. Avec Elisabeth Vidal, il s'agissait d'une soirée internationale. Dans vingt ans, on reparlera de ces concerts tourrettans époustouflants, possibles uniquement à cause du rayonnement incroyable du docteur Frère au niveau culturel et de ses liens avec les plus grands artistes de l'époque.
En tout cas, les Tourrettans l'avaient bien compris: l'église était bondée et très tôt, le souffle d'un grand moment de musique passa sur la foule subjuguée. Il faut dire qu'elle avait devant elle, là, tout près, une diva dans toute l'acception du terme, sans les tristes inconvénients inhérents à ce genre de monstre sacré. Pas de retard, pas de caprice (et pourtant, il faisait une chaleur d'étuve dans l'église, ce soir-là), et surtout, un profond respect du public: elle a su entretenir, par exemple, un physique des plus agréables et cultiver une grâce naturelle, une élégance du geste et du mouvement.
On est à l'opposé de cette sorte de dictature des hippopotames qui a longtemps sévi sur le monde de l'Opéra. Convention! Disait-on. Oui. Peut-on imaginer une de ces dames, frisant le quintal, interpréter les rôles de Kim Basinger ou Sophie Marceau? Alors pourquoi pas l'inverse? Pourquoi l'Opéra, monde de beautés (à la fois musique, danse, chant, théâtre, architecture), s'autoriserait-il seul à se moquer du public? Il serait temps de revenir vers de vraies valeurs, celles qu'on voulues les musiciens eux-mêmes, au lieu de présenter un Faust ventripotent, traversant la scène à vélo (bel exploit) tandis que fond sur lui Méphisto en deltaplane et que l'énorme Marguerite repasse son linge en regardant la télé, dans un décor misérable (mais terriblement coûteux)...

Car Elisabeth Vidal est sûrement la plus belle, la plus gracieuse, la plus souriante des cantatrices de son temps. Sa voix au timbre lumineux est capable de toutes les virtuosités. Ses prestations par exemple dans l'air des clochettes de Lakmé, ou dans celui d'Olympia (Contes d'Hoffmann) sont à comparer aux plus grandes coloratures de tous les temps, avec un atout supplémentaire: ses extraordinaires moyens d'expression physique, peut-être supérieurs même à ceux de Petibon. Et là où elle domine encore plus toutes les autres, en dehors de la beauté éblouissante, c'est dans les nuances qu'elle est capable de varier à l'infini. Sans compter le fameux contre-la bémol (six degrés au-dessus du légendaire "contre-ut"), qu'elle est la seule au monde à distiller avec cette qualité.
Le presque aussi célèbre baryton-basse André Cognet, son époux, parut lui aussi au mieux de sa forme dans les airs français classiques tels que celui d'Escamillo (Carmen), de Méphisto (Faust); mais encore de Rigoletto, chanté en duo avec Elisabeth Vidal. Et lui aussi, beau, svelte et élégant, sait cultiver le respect du public, bouger, et "habiter" avec force les personnages qu'il interprète.

Qui plus est, le couple dirige une école de chant internationale "Operaction" dont quelques élèves sont venus se produire en deuxième partie de concert: Joëlle Fleury, la Française, Yeté Queiroz, Franco-Brésilienne, Eun Kyung Kim la colorature coréenne, Boram Lee, le Chinois Djen Huang et surtout, le formidable baryton Chang Nan Lim promis à un avenir des plus glorieux (un Papageno pour le moins époustouflant!). La mission que s'est donnée le couple est des plus louables: "séduire un nouveau public, démontrer par les prestations de ces jeunes gens talentueux que le lyrique n'est pas réservé à une élite d'initiés, mais qu'il peut aujourd'hui et maintenant émouvoir tout le monde..." La grande soirée que les professeurs et leurs élèves ont donnée en constitue une éclatante démonstration.

OPERACTION : courriel : operaction@wanadoo.fr --- site http://www.blisspartners.com

Le docteur Frère, qui est déjà le plus grand organisateur de spectacles de l'hexagone (et sans doute plus) avec 340 représentations décentralisées, a réussi là sans doute l'un des plus beaux concerts de sa carrière.
Les Amis du château, toujours discrets, mais d'une serviabilité exceptionnelle, ont largement participé à cet exploit.

Et l'ovation de tout un public debout, exprimant ainsi avec force sa gratitude pour la prestation du couple, cette vigoureuse ovation était aussi un peu pour eux quelque part.

Valéry d'AMBOISE 17/07/2006

Ci-dessous, un aspect du public

Ci-dessous, quelques élèves de "Operaction"
et leur talentueux pianiste accompagnateur
Ci-dessous, Elisabeth Vidal et André Cognet
Ci-dessous, le docteur Frère et les artistes